Aspect génétique du syndrome de LYNCH

M. Brivaël GERY – Conseiller en Génétique – CHU Rennes

Le corps humain est constitué de milliards de cellules qui possèdent chacune un noyau dans lequel se trouve notre patrimoine génétique. Ce patrimoine génétique est notre plan de fabrication. Il est organisé en 46  chromosomes regroupés en 23 paires. Pour chacune de ces paires, un chromosome provient du père, un de la mère. Ces chromosomes sont constitués d’un filament (la molécule d’ADN) enroulé sur lui même. L’ADN est formé à partir de 4 lettres (A T C G) et correspond à un texte de 3 milliards de lettres. Chacun de nos caractères (couleurs des yeux, forme du visage etc…) est déterminé par des parties bien précises de cet ADN appelées des gènes. Notre patrimoine génétique est composé d’environ 25 000 gènes. Nos gènes étant sur nos chromosomes, nous avons également 2 copies par gène (1 paternelle et 1 maternelle). Les gènes sont des plans de fabrication qui permettent à la cellule de produire des protéines qui sont les molécules qui  remplissent les fonctions indispensables à son fonctionnement.

Les cellules de l’organisme se renouvellent en permanence. Lorsqu’une cellule se divise, elle doit recopier à l’identique l’ensemble de son patrimoine génétique, soit les 3 milliards de lettres qui composent l’ADN. Il se produit fréquemment des erreurs (mutations) lors de ces divisions. Nous possédons des systèmes chargés de repérer et de réparer ces erreurs. Si ces systèmes sont défaillants, la cellule accumule un grand nombre de mutations et à terme peut devenir cancéreuse. En général, ces systèmes fonctionnent normalement à la naissance mais, sous l’effet de l’environnement (alcool, tabac, pollution…), des anomalies apparaissent. Parfois, chez certaines personnes ces systèmes sont défaillants dès la naissance, ce qui facilite l’apparition de mutations et à terme de cancers. C’est le cas des personnes porteuses du syndrome de LYNCH.

Le syndrome de LYNCH, ou syndrome HNPCC (Hereditary Non Polyposis Colorectal Cancer), est la forme la plus fréquente de prédisposition aux cancers du colon. Il concerne 1 personne sur 500 à 800. Son mode de transmission est autosomique dominant : autosomique signifiant qu’il concerne aussi bien les hommes que les femmes, dominant qu’une personne porteuse du syndrome de LYNCH a un risque sur deux de transmettre cette maladie, une chance sur 2 de ne pas la transmettre et ce, à chaque grossesse.

Le Syndrome de LYNCH est lié à une mutation d’un des gènes hMLH1, hMSH2, hMSH6, hPMS2. Ces gènes composent le système MMR (MisMatch Repair) dont le rôle est de repérer les fautes (mutation) qui se produisent à chaque division cellulaire et de les corriger afin que l’ADN reste identique d’une cellule à l’autre. Lorsque ce système ne fonctionne plus correctement, les erreurs de copie s’accumulent au fur et à mesure des divisions cellulaires avec, à terme, le risque que la cellule devienne cancéreuse.

Les cancers liés à un syndrome de LYNCH présentent des caractéristiques particulières au niveau de certaines parties de l’ADN appelées microsatellites, qui correspondent à des répétitions successives d’un même groupe de lettres (ex: cacacacacacac…). Ces parties d’ADN sont plus difficiles à recopier pour la cellule et il apparaît souvent des erreurs dans le nombre de répétitions, avec une variation de ce nombre entre les différentes cellules (instabilité microsatellitaire). Lorsque le système MMR fonctionne, il permet de maintenir un nombre similaire d’une cellule à l’autre, dans le cas contraire ce nombre est variable.

Il est possible aujourd’hui par une analyse sur le cancer de regarder si ce dernier présente une instabilité de son ADN ou pas. En plus de cette analyse, on recherche également dans les cellules tumorales la présence ou l’absence des protéines MMR directement fabriquées par les gènes MMR. L’absence d’une protéine MMR, couplée à une instabilité microsatellitaire dans une tumeur, permet de faire le diagnostic du syndrome de LYNCH de façon fiable. Ces analyses sont donc à l’heure actuelle réalisées devant tout cancer évoquant un syndrome de LYNCH découvert avant l’âge de 60 ans.

Si l’analyse de la tumeur et/ou l’histoire familiale évoquent un syndrome de LYNCH, on propose ensuite des analyses directes des gènes hMLH1 ou hMSH2 ou hMSH6 ou hPMS2. L’analyse génétique est réalisée à partir d’une prise de sang et d’un prélèvement salivaire. On teste si possible une personne atteinte d’un cancer présentant ces caractéristiques particulières. Si l’analyse retrouve une anomalie sur un de ces gènes, on peut alors proposer un test aux apparentés majeurs qui le souhaitent, afin de savoir s’ils ont besoin d’un suivi particulier ou non. Les personnes porteuses de cette anomalie auront ensuite un risque de la transmettre à leurs enfants.

Brivaël GERY – Conseiller en Génétique CHU Rennes 2013