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MARS BLEU 2018 – le mois du cancer du colon

MARS BLEU 2018

Le Syndrome de Lynch ou HNPCC (Hereditary Non Polyposis Colorectal Cancer) est une prédisposition héréditaire aux cancers du côlon et du rectum (sans polypose), de l’utérus (endomètre) et plus rarement à d’autres cancers.

En France, le cancer colorectal est en constante augmentation avec plus de 40.000 nouveaux cas chaque année dont 3% sont dus au syndrome de Lynch.
Dans ce dernier cas, il arrive fréquemment que plusieurs membres d’une même famille développent d’autres cancers.
Le Syndrome de Lynch encore appelé syndrome HNPCC,  concerne particulièrement les cancers familiaux du côlon et du rectum (sans polypose), de l’utérus (endomètre) et plus rarement des cancers de l’intestin grêle, des voies excrétrices urinaires et biliaires, del’estomac et de l’ovaire.

En Mars, des informations sur le Cancer Colorectal sont largement données par les GastroentérologuesIl faut se renseigner, certains donnent des consultations gratuites.
Nous remercions les membres de notre association de leur participation.

Il y a des journées organisées dans des hôpitaux et le fameux « Colon Tour » de la SFED prend la route pour un beau tour de France ! Voir les dates ci-après…

« Mars Bleu 2018 »

Les Dates des JOURNEES D’INFORMATION sur le CANCER COLORECTAL

Samedi 3 Mars 2018 >Pontarlier
Centre Hospitalier de Pontarlier
2 Fbg Saint-Etienne, 25300 PontarlierTél. 03 81 38 54 54
Stand d’information HNPCC LYNCH tenu par Gérard Piguet 

Mardi 6 Mars 2018 – PARIS – 11h00 à 16h00
Hôpital Européen Georges Pompidou
20 rue Leblanc –  75015 PARIS
conférences sur l’endoscopies, l’ oncologie, la chirurgie digestive
Stand d’information HNPCC LYNCH tenu par Diane Julhiet

Jeudi 08Mars  >ANNECY
Clinique Général Annecy
4 Chemin de la Tour la Reine – 74000 Annecy –  tél  0 826 888 888
Stand d’information HNPCC LYNCH tenu par Gérard Piguet

Samedi 10 Mars > BESANCON
Centre Commercial – Centre ville– Besançon
Les Passages Pasteur – 6 bis rue Pasteur – 25000 Besançon
Stand d’information conjoint HNPCC Lynch, ADECA et LIGUE CANCER.               

Jeudi 15 Mars 2018 –  LYON–  dès 10h
Centre Léon Bérard  – Hall 3
28 rue Laënnec – 69373 Lyon cedex 08
Des ateliers d’APA, diététiques et de socio-esthétiques (sous réserve) seront proposés ce jour-là ainsi qu’une conférence grand public et Françoise DESSEIGNE parlera du Syndrome de Lynch
Stand d’information HNPCC LYNCH tenu parGérard Piguet 

Vendredi 16 Mars 2018 > PARIS – 10h00>14h00
Hôpital Cochin –
27 rue du Fg Saint Jacques – 75014 Paris
Stand d’information HNPCC LYNCH tenu par Diane Julhiet               

Mars 2018 –  ARGONAY près d’Annecy
Clinique d’Argonay – 08 99 59 47 78
685 Route des Menthonnex, 74370 Argonay
Stand d’information HNPCC LYNCH tenu parGérard Piguet 

Lors de «  MARS BLEU » la SFED,  Société Française d’Endoscopie Digestiveest très mobilisée !
1000 hépato-gastroentérologues
100 établissements médicaux
Vous accueillent et vous informent gratuitement

Le Road TourColondays sillonne la France durant tout le mois de mars et fait étape dans 12 villes
Animations, information,prévention
Venez évaluer votre niveau de risque !
Entièrement gratuit

Début Mars, renseignez-vous sur le lieu d’arrêt du camion

https://www.colon-days.fr/road-tour-2018/

Mardi 13 Mars > Toulouse                                                                   Jeudi 22 Mars > Paris
Mercredi 14 Mars > Bordeaux                                                            Vendredi 23 Mars > Rouen
Jeudi 15 Mars > Limoges                                                                      Samedi 24 Mars > Lille
Vendredi 16 Mars > Nantes                                                                Mercredi 28 Mars Strasbourg  Samedi 17 Mars > Rennes                                                                   Jeudi 29 Mars > Dijon                Mardi 20 Mars > Paris                                                                          Vendredi 30 Mars > Lyon
Mercredi 21 Mars > Paris                                                                    Samedi 31 Mars > Marseille


 

Syndrome de Lynch : les différentes chirurgies du colon

par le Professeur Muriel Mathonnet – Chirurgie Digestive – CHU Limoges

Chez les patients porteurs d’un syndrome de Lynch, une résection colique ou rectale est très souvent indiquée. Une résection colique correspond à l’ablation d’une partie ou de la totalité du colon, alors qu’une résection rectale emporte une partie ou la totalité du rectum, ce qui supprime le réservoir que constitue cet organe, et parfois l’appareil sphinctérien, ce qui impose alors un anus artificiel à vie.

colon

D’un point de vue anatomique, le colon se place en cadre autour de l’intestin grêle, et le rectum lui fait suite, traversant le pelvis pour s’aboucher au canal anal. Classiquement le colon est séparé en 3 parties : le colon droit appelé aussi colon ascendant, le colon transverse, et le colon gauche comprenant le colon descendant et le sigmoïde, s’ouvrant dans la partie haute du rectum.

Chaque grand type de résection, colique ou rectale, est défini par un terme 
– la résection d’un segment colique quelque soit son étendue s’appelle une colectomie
– la résection d’une partie du rectum s’appelle une résection rectale
– la résection de la totalité du rectum s’appelle une proctectomie
– la résection de la totalité du rectum et de l’appareil sphinctérien s’appelle une amputation abdomino-périnéale

La chirurgie peut être indiquée dans plusieurs circonstances : ablation d’un segment digestif siège d’une tumeur, ablation d’une tumeur qui récidive, ou d’une deuxième tumeur, soulager les symptômes d’une maladie avancée.
La chirurgie est le seul traitement curatif en cas de tumeur. L’acte chirurgical répond à des règles précises, éditées par le HAS. Une résection de tumeur, emporte le segment digestif siège de la tumeur et les ganglions adjacents qui drainent l’organe. Il convient donc de respecter des marges saines, dites « marges de sécurité », (5 cm de part et d’autre de la tumeur) et d’enlever la totalité des ganglions drainant la partie de l’organe malade (au moins 12 ganglions). Tout est fait pour préserver au maximum l’appareil sphinctérien, ce qui impose parfois des anus artificiel de protection, appelés également stomies de dérivation. Celles-ci sont confectionnées quand les tissus coliques sont fragiles ou quand la suture digestive (appelée aussi anastomose) est située près de l’anus. Ces stomies évitent que les matières fécales souillent l’anastomose, et compromettent sa bonne cicatrisation. Ces stomies temporaires sont laissées en moyenne 2 à 4 mois. Le contrôle des anastomoses est systématique avant leur suppression. Quand la continence est imparfaite, il est préférable d’avoir une stomie qui sera alors définitive. Ceci évite le port de couches.
Le type de résection pratiquée dépend de la situation de la tumeur. On distingue ainsi les colectomies droites, transverses, gauches, les résections sigmoïdiennes, ou même totales, les résections antérieures du rectum,  les proctectomies, les amputations abdomino-périnéales et les coloproctectomies ces dernières emportant tout le colon et le rectum. Le rétablissement de la continuité est réalisé par des sutures ou des agrafages. La technique d’anastomose avec agrafage est réalisée avec des pinces spéciales utilisant des agrafes en titane. Aucune allergie n’a été à ce jour décrite, et ces agrafes ne déclenchent pas les alarmes des portiques de contrôle.

Les résections coliques ou rectales peuvent se faire soit par laparotomie soit par coelioscopie. Le robot est une variante de la coelioscopie : le chirurgien opère à distance du patient et manipule des « manettes » pour diriger les « bras » de la machine dans le patient. Quelle que soit la technique choisie, la qualité de la résection doit être la même. C’est votre chirurgien qui choisit la voie d’abord.

La préparation avant la chirurgie s’est simplifiée. Avant une résection colique, aucune préparation n’est nécessaire. Avant une résection rectale, deux lavements sont administrés, un la veille, le second le matin de l’intervention. Une purge est donnée pour les proctectomies. Les hospitalisations ont lieu le plus souvent le matin de l’intervention. Il convient de rester à jeun à partir de minuit,  de raser la région opératoire et de prendre une douche antiseptique avant l’hospitalisation. Si une stomie est prévue, son emplacement est repéré.

En postopératoire,  les soins sont également simplifiés et le plus souvent un programme appelé « de réhabilitation rapide » est appliqué : boisson hyperglycémique dès le lendemain puis augmentation progressive de l’alimentation, lever le lendemain, pas de sonde gastrique ni de drainage, monitoring  de la douleur. La durée d’hospitalisation est en moyenne de 5 jours, sauf si une complication survient.

Les risques d’une résection colique ou rectale sont dominés par la survenue d’une fistule. Il s’agit d’un défaut d’étanchéité au niveau d’une suture digestive. Une prise en charge urgente s’impose. Le plus souvent un drainage ou une réintervention sont nécessaires. D’autres complications peuvent survenir en postopératoire : abcès, rétention d’urine, saignement au niveau du site de résection, phlébite ou embolie pulmonaire, occlusion. La survenue d’une complication pendant la période postopératoire est favorisée par la dénutrition, l’obésité, l’existence d’un diabète, le tabac, l’athérosclérose, l’existence d’une souffrance des tissus sains autour de la lésion (cas des cancers en occlusion), des difficultés per-opératoires.

Plus à distance, peuvent survenir, un rétrécissement de l’anastomose, des douleurs chroniques, des troubles du transit (diarrhées ou constipation), des occlusions, une fatigue, des dysfonctions sexuelles (impuissance ou problème d’éjaculation).

Au total, la laparoscopie a nettement amélioré la qualité de vie car la rançon pariétale est moindre, mais elle doit assurer la même qualité de résection que la laparotomie. Les risques chirurgicaux sont multifactoriels. Le colon restant doit toujours être surveillé. Il n’y a pas lieu de réséquer la totalité du colon de manière préventive. Enfin il ne faut jamais hésiter à demander des compléments d’information au moment de la consultation avec le chirurgien ou l’anesthésiste.

Pr Muriel Mathonnet – CHU Limoges – 2014

Psychologie : l’accompagnement du patient au cours d’un parcours oncogénétique

Par Sébastien Teillout – Psychologue Clinicien – service Oncologie Médicale – CHRU Limoges

En avant propos, il semble assez important de rappeler que chaque patient s’inscrit et appartient à une histoire singulière et qu’il est défini étymologiquement comme étant « celui qui souffre ». Au-delà d’être un patient, ce dernier est avant tout un individu qui se définit selon 3 dimensions : une identité, une expérience de vie et une subjectivité. C’est à ce titre que chaque patient et donc chaque individu est singulier et différent.

La démarche oncogénétique va se décomposer en différents temps bien distincts et pour lesquels, un éventuel retentissement psychologique peut être opérant : l’orientation vers une consultation oncogénétique, la 1ère consultation (cf. : l’arbre généalogique, l’information sur la démarche, le consentement,  le prélèvement),  l’attente du résultat de l’analyse moléculaire, le rendu et enfin le suivi.

L’objectif de cette 1ère consultation va être de répondre aux patients qui, compte tenu de leurs histoires familiales, s’interrogent sur le risque qu’ils ont de développer à leur tour un cancer et de les informer des modalités de prévention et de dépistage adaptées. En d’autre terme, il va être question d’une évaluation du risque individuel qui peut impliquer par ailleurs les membres de toute une famille : qu’ils aient ou non un cancer. De par cette approche spécifique, l’oncogénétique devient une discipline qualifiée de médecine prédictive et/ou préventive.

De manière générale, on observe 3 profils de consultants pour lesquels il existe une échelle de risque très variable :

  • Des individus indemnes de toute pathologie, se croyant à tort ou à raison plus menacés que d’autres ;
  • Des individus indemnes (dénommés aussi « cas apparenté » ou « pré symptomatique ») appartenant à une famille frappée par le cancer, mais à haut risque de développer un cancer ;
  • Des individus déjà atteints (dénommés aussi « cas index »), dont le motif de consultation est parfois soit à leur demande soit à la demande d’un tiers.

Sur un plan psychologique, les principales motivations plus ou moins conscientes – inconscientes qui poussent les individus à réaliser le test génétique sont : la peur de la mort et/ou de la déchéance physique ainsi que la culpabilité du poids de la transmission.

L’élaboration de l’arbre généalogique mais aussi le fait de se positionner sur celui-ci, va être un temps particulier de la consultation  tant pour le patient que pour son entourage. Son élaboration va réactiver voire mettre au grand jour une histoire de vie à la fois personnelle et familiale, pouvant réactiver des blessures plus ou moins anciennes et traumatiques (les conflits, les ruptures, les secrets ou tabous, des deuils, le nombre de décès, la mise en évidence de ceux qui pourraient être « responsable de » ou pouvant devenir de « futur malade » …).

Il existe cependant un paradoxe concernant le test pré symptomatique :

  • Si le résultat est positif : la personne se retrouve dans une position d’individu en bonne santé, menacé par le savoir anticipé d’une maladie qui arrivera ou pas, sans avoir la possibilité de connaitre le moment de sa survenue à l’avance
  • Si le résultat est négatif : l’annonce de l’absence de mutation est accueillie bien évidemment avec beaucoup de soulagement. Toutefois, elle peut être vécue de façon négative. Car l’individu va devoir faire le deuil de « guérir du risque » qui peut prendre un certain temps, d’autant plus si ce dernier appartient à une fratrie où des individus sont porteurs du risque.

Tout au long de la démarche oncogénétique, le patient et son entourage va avancer à son rythme selon un chemin psychologique singulier parfois asymétrique : phase de sidération, de pleurs, de déni, de colère et de reproches, de culpabilité, d’hyper contrôle, de passivité, d’hyperactivité, …

Toutes ces manifestations sont dites normales et correspondent à des tentatives de contrôler l’angoisse de mort, qui surgit face à un avenir incertain et traumatisant. Afin de gérer cette angoisse, le patient va devoir mettre en place des mécanismes de défense qui s’avèreront plus ou moins adaptés et malléables et qui seront à respecter, tels que l’anticipation, le déplacement, l’isolation, la projection agressive, la rationalisation/intellectualisation, la régression, la sublimation/combativité, …

De façon générale, et non exhaustive,  l’accompagnement psychologique va consister à :

  • tenter de redonner du sens par:
    • l’évaluation de l’état émotionnel du patient et de son entourage
    • l’éclaircissement avec lui des enjeux que recouvre la démarche oncogénétique : ses motivations, ses représentations liées à la maladie, ses perspectives de projection dans un futur probabiliste de statut de risque (2 scenarios possibles : être porteur ou non du gène délétère), la notion de transmission héréditaire, l’impact du résultat sur sa vie future, …
    • l’évaluation de la compréhension des informations reçues
  • évoquer la dynamique familiale (ses modes de communication, les non-dits, les secrets, les tabous, les conflits voire les ruptures de lien)
  • travailler la transmission de l’information aux autres membres de la famille
  • discuter et explorer l’ensemble des différents domaines de la vie du patient qui serait la préoccupation du moment.

Recevoir une mauvaise nouvelle par un médecin est une épreuve psychologique, mais la retransmettre à l’ensemble de sa famille est au plus haut point sous le sceau d’un traumatisme chargé d’affectivité.
Comment trouver les bons mots ? Comment convaincre de réaliser un dépistage et une surveillance préventifs ?  Comment faire avec un choix de « non surveillance »?

Etre le messager de l’information au sein de sa famille, c’est prendre le risque de parler, d’être rejeté voire haï par ses proches. L’ensemble des patients relatent assez clairement le sentiment de honte, de culpabilités associées à un niveau plus ou moins élevé d’anxiété et d’angoisse.
Toutefois, il n’existe pas de bonne manière pour annoncer une mauvaise nouvelle. Cette démarche est singulière et libre, mais aussi est fonction de la circulation de la communication intrafamiliale.

La parution du Décret n°2013-527 du 20 juin 2013 relatif aux conditions de mise en œuvre de l’information de la parentèle dans le cadre d’un examen des caractéristiques génétiques à finalité médicale, vient poser un nouveau cadre réglementaire à la démarche oncogénétique soulevant à la fois de nouvelles questions éthiques, une obligation légale d’informer officiellement ses apparentés et l’introduction d’une harmonisation des règles de « bonne pratiques ».

Pour conclure, il est important de rappeler que la réalité biologique et le cheminement psychique se font rarement dans le même contexte de temporalité. Il apparait donc judicieux de prendre le temps d’avancer au rythme de chaque patient, à partir de ses capacités du moment, tout en tenant compte de ses limites. A défaut, le patient risque de consolider ses mécanismes de défense et de mettre involontairement en difficulté les professionnels et son entourage.

Par ailleurs, il est essentiel de souligner l’évidence, que chaque professionnel fait également appel à des mécanismes de défense, lesquels peuvent parfois conditionner voire mettre en danger psychique le patient et/ou la relation soignant-soigné.

 Sébastien Teillout – Service Oncologie Médicale – CHRU Limoges – 2014

Le dépistage par coloscopie dans le syndrome de Lynch

par le Dr Marianne Picard-Croguennec – Gastroentérologie – Clinique Chénieux Limoges

Il s’agit d’un dépistage important dans ce syndrome puisqu’il permet de détecter et de réaliser l’exérèse de lésions précancéreuses. Il s’adresse à tous les patients porteurs d’une mutation à partir de l’âge de 20 ans, ou plus tôt s’il y a des signes cliniques (sang dans les selles, douleurs abdominales, modification du transit).

Ce dépistage se fait par coloscopie complète, c’est-à-dire sur l’ensemble du côlon et pas seulement par rectosigmoidoscopie. Cette coloscopie doit avoir lieu tous les 2 ans. Durant cet examen, le gastro entérologue doit réaliser une coloration de l’intestin à l’aide d’un colorant vital, l’indigo carmin. Ce geste est essentiel car il permet de faire ressortir le relief de la muqueuse et de mieux visualiser des lésions planes qui sont les principales lésions coliques du syndrome de Lynch.

Le temps le plus délicat de la coloscopie est la préparation du côlon. En effet, il est primordial que la muqueuse colique soit parfaitement nettoyée si on veut détecter un maximum de polypes, parfois millimétriques.

Cette préparation s’effectue en 2 temps : un régime sans résidus pendant les 4 jours qui précédent l’examen et la purge proprement dite qui reste la partie la plus difficile pour le patient… Il existe actuellement plusieurs types de purges, la classique avec du PEG, pour laquelle il faut boire 3 à 4L de préparation dont le gout rend la prise difficile, et d’autres, plus récentes, beaucoup plus aisées à prendre mais dont le résultat est parfois moins net. La préparation est surtout à adapter en fonction du transit de base du patient.

La coloscopie en elle même s’effectue sous anesthésie générale, dure environ une quinzaine de minutes (plus s’il y a des polypes à enlever). L’hospitalisation se fait le plus souvent en ambulatoire. On peut réaliser dans le même temps anesthésique une gastroscopie afin de réaliser un dépistage au niveau de l’estomac. Il n’y a cependant pas de recommandation par rapport à ce dernier examen.

En somme, les recommandations actuelles dans le cadre du syndrome de Lynch préconisent une coloscopie tous les 2 ans avec coloration par indigo carmin à partir de l’âge de 20 ans pour tous les porteurs d’une des mutations.

Dr Marianne Picard-Croguennec, Clinique Chénieux  Limoges 2014

Aspect pratique de la consultation d’oncogénétique

par Bérénice Hébrard – Conseillère en Génétique – CHU  Limoges

 

L’objectif de la consultation de génétique

est l’identification des personnes à hauts risques de développer un cancer, grâce à la détermination de leur statut génétique, afin d’adapter les mesures de prévention et de dépistage. Il s’agit d’une démarche individuelle mais à retentissement familial, non obligatoire mais vivement conseillée pour adapter les mesures de dépistage vis-à-vis du sur-risque de cancer. Lorsqu’une personne est adressée en consultation d’oncogénétique par son médecin (oncologue, gynécologue, gastroentérologue, etc.) ou par elle-même, on dit alors qu’elle entame une « démarche » d’oncogénétique. En effet, la recherche de mutation génétique dans la famille comporte plusieurs étapes : tout d’abord le premier contact avec le secrétariat et la prise d’information personnelle et familiale puis le rendez-vous avec le médecin/conseiller en génétique, l’attente des résultats de génétique (plusieurs mois parfois), la consultation de rendu de résultat et enfin selon le résultat, la consultation de suivi. A ces rendez-vous peuvent s’ajouter des rendez-vous avec le psychologue.

Nous allons donc reprendre ces différentes étapes de la démarche d’oncogénétique.

La prise de rendez-vous 

Généralement, lors de la prise de rendez-vous, la secrétaire ou le conseiller en génétique interroge le patient sur ses antécédents familiaux et personnels et lui demande de récupérer les comptes rendus opératoires et d’anatomo-pathologie des membres de sa famille ayant eu un cancer. Parfois, un questionnaire est envoyé quelques semaines avant la consultation pour demander tous ces renseignements.

La consultation avec le médecin oncogénéticien, le conseiller en génétique et le psychologue 

Le patient, suite à la 1ère étape de la constitution du dossier, est reçu en consultation par le médecin onco-généticien ou le conseiller en génétique. Cette première consultation permet de compléter l’histoire familiale en traçant l’arbre généalogique afin de poser l’indication de recourir ou non à un test génétique.  L’indication doit être validée par les comptes rendus médicaux des apparentés d’où le recueil parfois fastidieux de tous ces éléments.

L’analyse moléculaire

Elle est initiée suite au consentement écrit du patient. Dans le cas du syndrome de Lynch, les gènes MLH1, MSH2 et MSH6 sont analysés. Une analyse moléculaire est une lecture de toute la série de  lettres (G, C, T ou A) qui constitue le gène. Lorsqu’une lettre est remplacée par une autre la séquence est alors modifiée et entraine une anomalie sur les protéines normalement construites grâce aux gènes et leurs séquences. Ce sont les protéines codées par les gènes MLH1, MSH2 et MSH6 qui, lorsqu’elles sont anormales, sont responsables du syndrome de Lynch.
L’analyse moléculaire nécessite la réalisation d’une prise de sang (puisque c’est l’ADN de cellules présentes dans le sang qui sera analysé). Si une mutation est identifiée, une deuxième prise de sang sera alors demandée pour confirmer le résultat.

La consultation de rendu des résultats

Le résultat n’est jamais envoyé par courrier directement au patient. Il est rendu en consultation individuelle souvent en présence du psychologue, afin d’expliquer le résultat et répondre aux questions du patient. Lors de cette consultation, en cas de mise en évidence d’une mutation, la prise en charge adaptée au sur-risque de cancer, est réexpliquée et détaillée.  Le patient est également inclus après son consentement dans un programme de suivi des personnes à hauts-risques de cancer. Ces programmes permettent de mieux coordonner les prises en charge entre les spécialistes et d’accompagner le patient dans son parcours de soin.

La consultation de suivi

Sur le CHU de Limoges cette consultation de suivi  « post-résultat » avec l’oncogénéticien permet de faire le point avec le patient sur ses premiers rendez-vous pour les examens de dépistage et sur la diffusion de l’information génétique dans la famille afin que les apparentés puissent bénéficier du dépistage. A long terme, la consultation de suivi permet de mettre à jour la surveillance du patient selon l’évolution des recommandations.

Si une mutation a déjà été identifiée dans la famille

la démarche d’oncogénétique est légèrement différente. L’arbre généalogique et le recueil des informations familiales ont déjà été établis par l’apparenté à l’initiative de la démarche et la mutation familiale est connue.
La première consultation avec l’oncogénéticien/conseiller en génétique et le psychologue a alors pour objectif d’expliquer le syndrome recherché, le risque a priori d’être porteur de la mutation familiale et l’intérêt du dépistage génétique. Une deuxième consultation avec le psychologue est recommandée avant de procéder aux deux prélèvements sanguins indépendants c’est-à-dire réalisés à des jours différents. Le résultat du deuxième prélèvement permet ainsi de confirmer celui du premier. Mais pour éviter de faire déplacer le patient une deuxième fois,  le prélèvement sanguin peut être le plus souvent associé à un frottis jugal, fait le même jour.  Le résultat de génétique est rendu en consultation par l’oncogénéticien là encore en présence du psychologue.

Bérénice Hébrard – CHU Limoges – Oct 2014

Décret de loi du 20 Juin 2013

L’Institut Paoli Calmette à Marseille vient d’organiser, le 27 février 2014  une journée Enseignement et Formation en cancérologie  sur le thème « Qu’est ce que la génétique apporte à la  Psychanalyse ? » Secret et information familiale :  Renoncer au secret dans l’intérêt d’un tiers…Comment  se  décline  la question  du  secret  en  génétique médicale  et  en   oncogénétique puisque  bien au-delà du sujet qui consulte le fait de dire ou   de ne   pas dire, de savoir  ou de ne pas savoir, va  nécessairement concerner toute une constellation  familiale ? Le  récent  décret  de  loi  du  20 Juin 2013,  précise   l’obligation  pour une personne qui se voit prescrire  un  examen  de  ses   caractéristiques  génétiques, à  finalité médicale,  d’informer   les  membres  de   sa  famille potentiellement concernés, des  résultats de  cet examen  «dès lors que des mesures  de prévention   y   compris  de conseil génétique, ou  de  soins    pourraient leur être proposés ». A partir de ce moment, la possibilité pour le sujet de garder le secret de ce qui relève de son intimité, d’exercer son droit à ne pas communiquer, à se taire à propos de sa santé et de son statut génétique, se trouve escamotée par l’obligation d’informer, de dire, de révéler. L’injonction faite au sujet est d’opter pour la transparence sauf à engager sa propre responsabilité vis-à-vis de ses apparentés.
>>>  De quelles façons ces nouvelles règles prendront corps dans les pratiques ? A quelles tensions éthiques, à quels dilemmes cliniques serons nous exposés ? 

Aspects chirurgicaux

Quels sont les différents types de chirurgie du colon ?
Comment choisit-on entre les différentes techniques ?
Dr V. Desfourneaux, Service de chirurgie hépatobiliaire et digestive – Hôpital Pontchaillou – CHU Rennes

Les patients ayant une mutation responsable d’un syndrome HNPCC/LYNCH sont exposés à un risque très important de cancer du côlon et du rectum au cours de leur vie. Ils doivent donc, s’ils sont identifiés, faire l’objet d’une surveillance régulière pour diminuer ce risque. Quand un patient présente un polype qui ne peut pas faire l’objet d’une résection endoscopique ou un cancer du côlon, une intervention chirurgicale est alors requise pour faire le traitement de ce polype ou de ce cancer. Se discute alors l’opportunité de prévenir le risque de survenue sur le côlon d’un autre cancer du côlon ou du rectum.

Quels sont les différents types de chirurgie du colon ?     L’objectif de la chirurgie est de réaliser l’ablation de la tumeur du colon, en emportant une portion saine du colon (au moins 5 centimètres) et en y associant un curage ganglionnaire. En effet, la qualité de l’exérèse chirurgicale est un facteur pronostique de récidive locale et de survie.  Une fois la portion du colon atteinte enlevée, la continuité digestive est effectuée soit de façon manuelle (à l’aide de fils) soit de façon mécanique
Chirurgie

Dans de cas plus rares, le chirurgien peut être amené à enlever l’ensemble du colon et rétablir la continuité en réalisant une anastomose entre l’intestin grêle terminale et le rectum : on parle de colectomie totale. La colectomie, segmentaire ou totale, peut être faite par chirurgie conventionnelle (laparotomie) ou par cœlioscopie. La cœlioscopie donne moins de douleurs postopératoires, permet une reprise plus rapide du transit  intestinal, aboutit à une durée d’hospitalisation plus courte.

Comment choisit-on entre les différentes techniques ?    Il n’y a pas d’étude qui ait pu démontrer qu’entre une résection classique qui n’emporte qu’une partie du côlon, celle où se trouve le cancer, et qui serait suivie d’une surveillance endoscopique tous les 2 ans ou une ablation complète du côlon qui nécessiterait alors qu’une surveillance du rectum, il y ait une différence en terme de survie, de complication de la chirurgie ou de retentissement sur la qualité de vie.
Il a été démontré que plus le cancer  se développe à un jeune âge et plus le cancer était pris en charge quand il était petit et plus le bénéfice d’une colectomie totale cherchant à prévenir le risque de survenue d’un second cancer était important.                                        Colectomie  totale et  segmentaire ont une mortalité postopératoire  identique, entre 0,6 % et 3% suivant les études, et  un taux  de complications  postopératoires  identiques. Par contre, la colectomie  segmentaire donne un meilleur résultat fonctionnel et une meilleure qualité de vie, même si les études dont nous disposons pour le démontrer ont un niveau de preuve assez faible.
La décision sera prise en Réunion de Concertation Pluridisciplinaire (RCP) en fonction de l’âge du patient, des antécédents de la famille et sûrement dans l’avenir de l’anomalie du gêne identifié.
Il n’y a pas d’indication à faire une colectomie préventive chez un patient ayant un syndrome HNPCC/Lynch et indemne de tout cancer du côlon.
Dr  Véronique DESFOURNEAUX – CHU Rennes – 2013

Les 100 ans du syndrome de Lynch

Dr Catherine DUGAST
Oncologie Médicale – CHU de Rennes

En 1913 le Dr Alfred Scott Whartin décrivait la première famille porteuse d’un syndrome de LYNCH. Cent ans plus tard, la revue Familial Cancer consacre un numéro entier à cette maladie génétique.

C’est dans les années 1895 que la couturière du Dr Alfred Scott Whartin lui confie son inquiétude quant à son risque de cancer car dans sa famille toutes les générations développent des cancers du côlon, de l’estomac ou de l’utérus à un âge jeune. A l’époque le Dr Warthin va émettre l’hypothèse que certains cancers pourraient être liés à un facteur héréditaire qui se transmettrait dans les familles. A partir des années 1970 plusieurs autres familles seront rapportées confirmant ainsi cette hypothèse. En 1990 un meeting consacré aux formes héréditaires de cancers du côlon (sans polypose) va réunir de nombreux médecins et chercheurs.

De cette réunion sortiront les premiers critères diagnostiques de cette maladie : les critères d’Amsterdam de type 1 (la maladie peut être suspectée devant au moins 3 cas de cancers du côlon sur au moins 2 générations, un des cas étant survenu avant 50 ans). Ces critères très restrictifs ne tiennent pas compte des cancers non colorectaux que l’on peut observer dans cette maladie, ni des difficultés diagnostiques dans les petites familles. Ils seront revus en critères de type 2, puis en critères de Bestheda qui intégreront les avancées biologiques  faites entre temps. Il faudra véritablement attendre 1992 pour une reconnaissance pleine et entière de cette pathologie grâce aux avancées réalisées à la fois dans la compréhension des particularités biologiques des cancers provoqués par le syndrome de LYNCH mais également, bien sûr, par la découverte des 4(5) gènes impliqués dans cette affection (hMLH1, hMSH2(EPCAM), hMSH6, hPMS2). Ces découvertes vont ouvrir le champ aux chercheurs à de nombreuses études dans des domaines aussi importants que la prévention (aspirine, vaccination…) ou le traitement des cancers.

De nombreuses études sont encore nécessaires pour améliorer la prise en charge de cette maladie. Une des questions qui reste posée porte sur le risque de cancer d’une personne atteinte d’un syndrome de LYNCH, ce risque n’est pas probablement pas le même selon type de population, l’environnement du patient, le gène malade…. Or, il est très important de le définir car c’est de cela que dépendent les recomman-dations de surveillance et de chirurgie qui vont être proposées.

Une étude française ERISCAM publiée en 2011 dans une grande revue médicale (JAMA) a été menée auprès de 537 familles ayant une anomalie sur un des gènes hMLH1, hMSH2 ou hMSH6. Cette étude a permis de montrer que le risque de cancers était assez proche pour les personnes porteuses d’une anomalie sur les gènes hMLH1 ou hMSH2 mais vraisemblablement plus faible quand il s’agissait d’une anomalie sur le gène hMSH6 ; que ce risque pour la femme était au moins aussi important pour les tumeurs gynécologiques (utérus et ovaire) que pour les cancers du côlon ; que le risque de cancers « autres » restait assez faible et que l’âge d’apparition des premiers cancers était plus tardif avec le gène hMSH6. Grâce à cette étude, il a été proposé une prise en charge un peu allégée dans les familles porteuses d’une anomalie sur le gène hMSH6. Toutes ces données demandent cependant confirmation en raison notamment du petit nombre de familles concernées par une anomalie sur le gène hMSH6 (33).

C’est pourquoi un nouveau projet de recherche va se mettre en place :

le projet FR3LyS/OFELy qui aura des objectifs cliniques mais également biologiques. Cette étude s’intéressera pour sa partie clinique aux risques de cancers autres que coliques et gynécologiques, aux risques selon l’anomalie génétique identifiée et à la surveillance proposée aux familles afin de mieux en mesurer l’efficacité. La partie biologique, elle, cherchera à comprendre pourquoi, pour un même gène, les manifestations cliniques peuvent être différentes d’une famille à l’autre en s’intéressant à ce que l’on appelle les gènes modificateurs mais également aux caractéristiques des cancers provoqués par le syndrome de LYNCH (comment répondent-ils aux traitements ? Y a-t-il une différence dans le taux de guérison ?…).

Cette nouvelle étude qui, nous l’espérons, débutera prochainement sera l’occasion de revenir vers vous et vos familles, car c’est grâce à la participation de tous que de nouveaux progrès pourront être réalisés.


Dr Catherine Dugast – Oncogénétique – CHU Rennes

Les « non-dits » familiaux, l’importance de parler, de dédramatiser

Madame Monique Roblin
psychologue clinicienne et psychothérapeute Service de Génétique Clinique –  CHU Rennes

Lorsqu’il y a une maladie génétique dans une famille, et en particulier le cancer, très souvent, on n’en parle pas, « on fait comme si » elle n’existait pas. C’est un secret, un tabou.

Ce silence renvoie à la crainte de la réalité même de la maladie dévastatrice voire mortelle pour certains et sur plusieurs générations. Il permet de protéger la famille, lieu considéré comme un refuge, un cocon et qui devient, avec le cancer, un lieu et un lien de mort entre les membres qui la constituent.

De toute façon, pour les générations précédentes, qu’il soit génétique ou non, le cancer, « on n’en parlait pas ». Il était vécu comme une « maladie honteuse », on ne prononçait pas le mot, c’était une malédiction. Etre malade, en plus de la souffrance, apportait son lot de culpabilité et de honte, et lorsqu’en plus, on se doutait qu’on transmettait à ses enfants cette malédiction, on préférait taire cette douleur.

Donc, on fait d’abord silence autour du cancer et cela finit par créer un secret, un tabou dans une tentative de préserver les liens familiaux et de pouvoir se dire : « tout va bien », « on est heureux d’être ensemble ».

Pourtant, certains tombent régulièrement malades et sur plusieurs générations. Mais chacun fait semblant de croire que « la vie continue normalement ». Le cancer constitue alors à la fois un danger, « une épée de Damoclès au-dessus de sa tête », et un « non-dit » : « tout le monde sait mais personne n’en parle ».

Cela devient un secret familial.

Cependant, l’ascendant malade vit dans la peur d’avoir transmis le cancer familial. La crainte, l’anxiété, l’angoisse sont à l’œuvre. Il ne peut pas en parler, pris entre la culpabilité, la honte et la peur d’être rejeté voire haï par ses enfants, ses proches, pour avoir donné la maladie mortelle. Il souffre d’abord dans son corps, faisant face à l’agressivité du cancer et des traitements. Il souffre psychologiquement car il doit faire face à sa responsabilité d’avoir pu transmettre et de dire ou pas : « c’est héréditaire ! »

Ses descendants font « comme s’il s’agissait d’un accident de la vie ». Ils refusent d’interroger la maladie, l’éventualité d’une transmission possible. On n’en parle pas pour éviter le drame de l’évidence : c’est génétique, cela se transmet.

Pour les générations précédentes, le tabou était renforcé par la difficulté de la médecine à repérer de façon scientifique le côté héréditaire de la maladie, et son impuissance à mettre en œuvre une prévention voire un soin. Alors pourquoi communiquer dans une famille sur ce qui est de l’ordre de la fatalité ? « On ne peut rien y changer ! »

Mais aujourd’hui, les avancées de la médecine permettent de faire un test génétique qui pour chacun va confirmer ou non la transmission du gène muté. Et, si nécessaire, une prévention et des soins médicaux peuvent être proposés.

Pour celui qui transmet la culpabilité et la honte sont toujours présentes. Comment faire autrement ?

Face à ces angoisses compréhensibles, face à l’enjeu pour ses proches : une possibilité de prévention et de soins médicaux rapides, la psychologue clinicienne du service de génétique est une ressource disponible.

Venir « parler » avec un tiers de ses difficultés à évoquer la maladie, son côté héréditaire, permet souvent de dédramatiser la situation. Evoquer ensemble la dynamique familiale, le ressenti des uns et des autres vis-à-vis du vécu de la maladie et la façon dont on peut en parler facilite ensuite la communication avec ses proches. Les entretiens sont également possibles en présence du conjoint non porteur de la mutation et/ou avec les enfants.

Lorsque les « non-dits » familiaux relèvent de l’interdit, du tabou, il est important de se faire aider par un professionnel.

Monique Roblin – Rennes 2013

Les Cancers Gynécologiques du Syndrome de Lynch II

Dr Vincent Lavoué et Pr Jean Levêque
Service de Gynécologie CHU Anne de Bretagne, Rennes (Breizh)

Le syndrome de Lynch II est aussi dénommé Human Non Polyposis Colorectal Cancer Syndrome : or historiquement c’est une agrégation de cancers certes colorectaux mais aussi gynécologiques (notamment de la partie interne du corps de l’utérus appelée endomètre) qui a attiré l’attention des médecins sur la nature héréditaire de ce syndrome de prédisposition.

En effet, chez la femme, une fois sur deux le cancer « sentinelle » (i.e. qui annonce la maladie) est gynécologique et la prévalence des cancers gynécologique est élevée (cancers de l’endomètre dans 40% des cas, de l’ovaire dans 10% des cas) à côté des cancers digestifs au sens large et des voies urinaires : on pourrait ainsi parler d’Human Non Polyposis Colorectal and Endometrial-Ovarian Cancer afin d’alerter les patient(e)s et les médecins sur le poids des cancers spécifiquement féminins.

Les principales données épidémiologiques chez les patientes atteintes de ce syndrome sont :
(a) une incidence cumulée jusqu’à 80 ans des cancers féminins bien supérieure à ce qui est observé dans la population générale (cancers endométriaux : 40% contre 3% chez les sujets sans mutation, cancers ovariens 10% contre moins de 1%),
(b) un âge moyen de survenue des cancers inférieur de 10 à 15 ans,
(c) des cancers ayant plus souvent des caractéristiques justifiant des traitements plus agressifs.

Le Maître Symptôme des cancers du corps de l’utérus est l’existence de saignements génitaux anormaux, qu’ils surviennent chez une femme ménopausée ou non (prenant alors la forme de saignements survenant entre les règles ou de règles anormales par leur durée ou leur abondance) : ce signe d’alerte fort est précoce et une prise en charge adaptée assure alors un bon pronostic. En effet, le muscle utérin (appelé myomètre, qui assure les contractions de l’accouchement) constitue un rempart épais à la diffusion de la maladie en dehors de l’utérus y compris par les voies de circulation vasculaires (vaisseaux lymphatiques ou sanguins) situées à la partie externe du myomètre. Ainsi, devant tout saignement anormal, il faut consulter son médecin qui prescrira en première intention une échographie pelvienne débouchant souvent sur une étude visuelle de la cavité utérine (nommée hystéroscopie) et un curetage de celle-ci pour analyse microscopique. A l’inverse,  les premiers signes cliniques du cancer de l’ovaire sont relativement banaux ,(ballonnements, troubles digestifs communs…) n’alertant que tardivement et la patiente et son médecin expliquant que la maladie cancéreuse soit découverte à un stade évolué dans plus de 70% des cas.

Chez les patientes porteuses d’une mutation, ayant donc un risque conséquent de développer un cancer gynécologique, et en l’absence de tout signe clinique, un dépistage des cancers utérins voire ovariens doit être proposé (à l’instar de la colonoscopie avec indigo carmin) : les recommandations françaises proposent que soient effectuées des explorations à partir de 30 ans de manière annuelle comportant une étude de la morphologie de l’endomètre par échographie (ou hystérosonographie, variante de l’examen échographique qui analyse les 2 faces de la cavité utérin après injection par le col utérin de quelques cc sérum salé stérile) ainsi que des ovaires, associée à un prélèvement de la muqueuse endométriale pour analyse microscopique.

Certaines équipes référentes (Pr Fabrice Lécuru, HEGP, Paris) pratiquent en sus une hystéroscopie aujourd’hui réalisée en ambulatoire et susceptible d’être couplée à la colonoscopie. Si le dépistage des lésions utérines est prometteur, celui du cancer de l’ovaire ne donne pas entière satisfaction : tant l’échographie que le dosage des marqueurs sériques (protéines que l’on dose dans le sang élevées en cas de cancer) manquent de sensibilité (méconnaissant d’authentiques lésions cancéreuses) et de spécificité (faisant craindre à tort des lésions cancéreuses), et dépistent des cancers ovariens déjà conséquents. Des progrès sont à attendre en utilisant des algorithmes mathématiques couplant les résultats de l’échographie et des marqueurs, ou venant des avancées de la biologie moléculaire.

La prévention du cancer passe par la chirurgie chez les patientes n’ayant plus de désir de grossesse : c’est l’hystérectomie avec annexectomie bilatérale (ablation de l’utérus, et du complexe trompes + ovaires). Elle est efficace en cas de mutation comme démontrée par une étude américaine où aucun cancer utérin ou ovarien n’a été noté chez les patientes opérées alors que chez les patientes non opérées 33% avaient présenté un cancer utérin et 5% un cancer ovarien. Le geste peut être réalisé par voie abdominale classique, vaginale ou mieux encore coelioscopique. La durée moyenne de l’intervention est de 1 heure avec une hospitalisation allant de 1 à 7 jours et un arrêt de travail moyen de 15 jours à 1 mois. L’intervention entraîne peu de complications à court terme, et ses séquelles liées à la privation hormonale due à l’ovariectomie peuvent être compensées par un traitement hormonal substitutif de ménopause. Sa réalisation impose une information loyale de la patiente, un temps de réflexion suffisant, et l’indication médicale est toujours posée dans le cadre d’une concertation pluridisciplinaire.                   …/

Des méthodes médicales préventives sont actuellement à l’étude au Royaume Uni et aux Etats Unis s’appuyant sur l’utilisation du stérilet au Levonorgestrel (stérilet délivrant dans l’utérus une hormone mettant l’endomètre au repos, très utilisé aujourd’hui en contraception) ou des pilules estro-progestatives dont on sait qu’elles diminuent le risque de cancer ovarien.

Le traitement de la ménopause chirurgicalement induite restaure une bonne qualité de vie (disparition des bouffées de chaleur, amélioration notable de la sécheresse vaginale, correction des troubles du métabolisme du sucre et du cholestérol, prévention de l’ostéoporose  en particulier) sans exposer au risque de cancer du sein puisque l’absence d’utérus permet de n’utiliser que les seuls estrogènes.

En conclusion, les cancers gynécologiques du syndrome de Lynch occupent une place quantitativement importante, et peuvent bénéficier d’un diagnostic précoce pour peu que les patientes en soient informées, d’un dépistage simple et acceptable, et d’une prévention aujourd’hui chirurgicale et peut-être médicale si les essais en cours sont concluants.

Dr Vincent Lavoué & Pr Jean Levêque – Rennes 2013