Syndrome de Lynch : les différentes chirurgies du colon

par le Professeur Muriel Mathonnet – Chirurgie Digestive – CHU Limoges

Chez les patients porteurs d’un syndrome de Lynch, une résection colique ou rectale est très souvent indiquée. Une résection colique correspond à l’ablation d’une partie ou de la totalité du colon, alors qu’une résection rectale emporte une partie ou la totalité du rectum, ce qui supprime le réservoir que constitue cet organe, et parfois l’appareil sphinctérien, ce qui impose alors un anus artificiel à vie.

colon

D’un point de vue anatomique, le colon se place en cadre autour de l’intestin grêle, et le rectum lui fait suite, traversant le pelvis pour s’aboucher au canal anal. Classiquement le colon est séparé en 3 parties : le colon droit appelé aussi colon ascendant, le colon transverse, et le colon gauche comprenant le colon descendant et le sigmoïde, s’ouvrant dans la partie haute du rectum.

Chaque grand type de résection, colique ou rectale, est défini par un terme 
– la résection d’un segment colique quelque soit son étendue s’appelle une colectomie
– la résection d’une partie du rectum s’appelle une résection rectale
– la résection de la totalité du rectum s’appelle une proctectomie
– la résection de la totalité du rectum et de l’appareil sphinctérien s’appelle une amputation abdomino-périnéale

La chirurgie peut être indiquée dans plusieurs circonstances : ablation d’un segment digestif siège d’une tumeur, ablation d’une tumeur qui récidive, ou d’une deuxième tumeur, soulager les symptômes d’une maladie avancée.
La chirurgie est le seul traitement curatif en cas de tumeur. L’acte chirurgical répond à des règles précises, éditées par le HAS. Une résection de tumeur, emporte le segment digestif siège de la tumeur et les ganglions adjacents qui drainent l’organe. Il convient donc de respecter des marges saines, dites « marges de sécurité », (5 cm de part et d’autre de la tumeur) et d’enlever la totalité des ganglions drainant la partie de l’organe malade (au moins 12 ganglions). Tout est fait pour préserver au maximum l’appareil sphinctérien, ce qui impose parfois des anus artificiel de protection, appelés également stomies de dérivation. Celles-ci sont confectionnées quand les tissus coliques sont fragiles ou quand la suture digestive (appelée aussi anastomose) est située près de l’anus. Ces stomies évitent que les matières fécales souillent l’anastomose, et compromettent sa bonne cicatrisation. Ces stomies temporaires sont laissées en moyenne 2 à 4 mois. Le contrôle des anastomoses est systématique avant leur suppression. Quand la continence est imparfaite, il est préférable d’avoir une stomie qui sera alors définitive. Ceci évite le port de couches.
Le type de résection pratiquée dépend de la situation de la tumeur. On distingue ainsi les colectomies droites, transverses, gauches, les résections sigmoïdiennes, ou même totales, les résections antérieures du rectum,  les proctectomies, les amputations abdomino-périnéales et les coloproctectomies ces dernières emportant tout le colon et le rectum. Le rétablissement de la continuité est réalisé par des sutures ou des agrafages. La technique d’anastomose avec agrafage est réalisée avec des pinces spéciales utilisant des agrafes en titane. Aucune allergie n’a été à ce jour décrite, et ces agrafes ne déclenchent pas les alarmes des portiques de contrôle.

Les résections coliques ou rectales peuvent se faire soit par laparotomie soit par coelioscopie. Le robot est une variante de la coelioscopie : le chirurgien opère à distance du patient et manipule des « manettes » pour diriger les « bras » de la machine dans le patient. Quelle que soit la technique choisie, la qualité de la résection doit être la même. C’est votre chirurgien qui choisit la voie d’abord.

La préparation avant la chirurgie s’est simplifiée. Avant une résection colique, aucune préparation n’est nécessaire. Avant une résection rectale, deux lavements sont administrés, un la veille, le second le matin de l’intervention. Une purge est donnée pour les proctectomies. Les hospitalisations ont lieu le plus souvent le matin de l’intervention. Il convient de rester à jeun à partir de minuit,  de raser la région opératoire et de prendre une douche antiseptique avant l’hospitalisation. Si une stomie est prévue, son emplacement est repéré.

En postopératoire,  les soins sont également simplifiés et le plus souvent un programme appelé « de réhabilitation rapide » est appliqué : boisson hyperglycémique dès le lendemain puis augmentation progressive de l’alimentation, lever le lendemain, pas de sonde gastrique ni de drainage, monitoring  de la douleur. La durée d’hospitalisation est en moyenne de 5 jours, sauf si une complication survient.

Les risques d’une résection colique ou rectale sont dominés par la survenue d’une fistule. Il s’agit d’un défaut d’étanchéité au niveau d’une suture digestive. Une prise en charge urgente s’impose. Le plus souvent un drainage ou une réintervention sont nécessaires. D’autres complications peuvent survenir en postopératoire : abcès, rétention d’urine, saignement au niveau du site de résection, phlébite ou embolie pulmonaire, occlusion. La survenue d’une complication pendant la période postopératoire est favorisée par la dénutrition, l’obésité, l’existence d’un diabète, le tabac, l’athérosclérose, l’existence d’une souffrance des tissus sains autour de la lésion (cas des cancers en occlusion), des difficultés per-opératoires.

Plus à distance, peuvent survenir, un rétrécissement de l’anastomose, des douleurs chroniques, des troubles du transit (diarrhées ou constipation), des occlusions, une fatigue, des dysfonctions sexuelles (impuissance ou problème d’éjaculation).

Au total, la laparoscopie a nettement amélioré la qualité de vie car la rançon pariétale est moindre, mais elle doit assurer la même qualité de résection que la laparotomie. Les risques chirurgicaux sont multifactoriels. Le colon restant doit toujours être surveillé. Il n’y a pas lieu de réséquer la totalité du colon de manière préventive. Enfin il ne faut jamais hésiter à demander des compléments d’information au moment de la consultation avec le chirurgien ou l’anesthésiste.

Pr Muriel Mathonnet – CHU Limoges – 2014