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Les Cancers Gynécologiques du Syndrome de Lynch II

Dr Vincent Lavoué et Pr Jean Levêque
Service de Gynécologie CHU Anne de Bretagne, Rennes (Breizh)

Le syndrome de Lynch II est aussi dénommé Human Non Polyposis Colorectal Cancer Syndrome : or historiquement c’est une agrégation de cancers certes colorectaux mais aussi gynécologiques (notamment de la partie interne du corps de l’utérus appelée endomètre) qui a attiré l’attention des médecins sur la nature héréditaire de ce syndrome de prédisposition.

En effet, chez la femme, une fois sur deux le cancer « sentinelle » (i.e. qui annonce la maladie) est gynécologique et la prévalence des cancers gynécologique est élevée (cancers de l’endomètre dans 40% des cas, de l’ovaire dans 10% des cas) à côté des cancers digestifs au sens large et des voies urinaires : on pourrait ainsi parler d’Human Non Polyposis Colorectal and Endometrial-Ovarian Cancer afin d’alerter les patient(e)s et les médecins sur le poids des cancers spécifiquement féminins.

Les principales données épidémiologiques chez les patientes atteintes de ce syndrome sont :
(a) une incidence cumulée jusqu’à 80 ans des cancers féminins bien supérieure à ce qui est observé dans la population générale (cancers endométriaux : 40% contre 3% chez les sujets sans mutation, cancers ovariens 10% contre moins de 1%),
(b) un âge moyen de survenue des cancers inférieur de 10 à 15 ans,
(c) des cancers ayant plus souvent des caractéristiques justifiant des traitements plus agressifs.

Le Maître Symptôme des cancers du corps de l’utérus est l’existence de saignements génitaux anormaux, qu’ils surviennent chez une femme ménopausée ou non (prenant alors la forme de saignements survenant entre les règles ou de règles anormales par leur durée ou leur abondance) : ce signe d’alerte fort est précoce et une prise en charge adaptée assure alors un bon pronostic. En effet, le muscle utérin (appelé myomètre, qui assure les contractions de l’accouchement) constitue un rempart épais à la diffusion de la maladie en dehors de l’utérus y compris par les voies de circulation vasculaires (vaisseaux lymphatiques ou sanguins) situées à la partie externe du myomètre. Ainsi, devant tout saignement anormal, il faut consulter son médecin qui prescrira en première intention une échographie pelvienne débouchant souvent sur une étude visuelle de la cavité utérine (nommée hystéroscopie) et un curetage de celle-ci pour analyse microscopique. A l’inverse,  les premiers signes cliniques du cancer de l’ovaire sont relativement banaux ,(ballonnements, troubles digestifs communs…) n’alertant que tardivement et la patiente et son médecin expliquant que la maladie cancéreuse soit découverte à un stade évolué dans plus de 70% des cas.

Chez les patientes porteuses d’une mutation, ayant donc un risque conséquent de développer un cancer gynécologique, et en l’absence de tout signe clinique, un dépistage des cancers utérins voire ovariens doit être proposé (à l’instar de la colonoscopie avec indigo carmin) : les recommandations françaises proposent que soient effectuées des explorations à partir de 30 ans de manière annuelle comportant une étude de la morphologie de l’endomètre par échographie (ou hystérosonographie, variante de l’examen échographique qui analyse les 2 faces de la cavité utérin après injection par le col utérin de quelques cc sérum salé stérile) ainsi que des ovaires, associée à un prélèvement de la muqueuse endométriale pour analyse microscopique.

Certaines équipes référentes (Pr Fabrice Lécuru, HEGP, Paris) pratiquent en sus une hystéroscopie aujourd’hui réalisée en ambulatoire et susceptible d’être couplée à la colonoscopie. Si le dépistage des lésions utérines est prometteur, celui du cancer de l’ovaire ne donne pas entière satisfaction : tant l’échographie que le dosage des marqueurs sériques (protéines que l’on dose dans le sang élevées en cas de cancer) manquent de sensibilité (méconnaissant d’authentiques lésions cancéreuses) et de spécificité (faisant craindre à tort des lésions cancéreuses), et dépistent des cancers ovariens déjà conséquents. Des progrès sont à attendre en utilisant des algorithmes mathématiques couplant les résultats de l’échographie et des marqueurs, ou venant des avancées de la biologie moléculaire.

La prévention du cancer passe par la chirurgie chez les patientes n’ayant plus de désir de grossesse : c’est l’hystérectomie avec annexectomie bilatérale (ablation de l’utérus, et du complexe trompes + ovaires). Elle est efficace en cas de mutation comme démontrée par une étude américaine où aucun cancer utérin ou ovarien n’a été noté chez les patientes opérées alors que chez les patientes non opérées 33% avaient présenté un cancer utérin et 5% un cancer ovarien. Le geste peut être réalisé par voie abdominale classique, vaginale ou mieux encore coelioscopique. La durée moyenne de l’intervention est de 1 heure avec une hospitalisation allant de 1 à 7 jours et un arrêt de travail moyen de 15 jours à 1 mois. L’intervention entraîne peu de complications à court terme, et ses séquelles liées à la privation hormonale due à l’ovariectomie peuvent être compensées par un traitement hormonal substitutif de ménopause. Sa réalisation impose une information loyale de la patiente, un temps de réflexion suffisant, et l’indication médicale est toujours posée dans le cadre d’une concertation pluridisciplinaire.                   …/

Des méthodes médicales préventives sont actuellement à l’étude au Royaume Uni et aux Etats Unis s’appuyant sur l’utilisation du stérilet au Levonorgestrel (stérilet délivrant dans l’utérus une hormone mettant l’endomètre au repos, très utilisé aujourd’hui en contraception) ou des pilules estro-progestatives dont on sait qu’elles diminuent le risque de cancer ovarien.

Le traitement de la ménopause chirurgicalement induite restaure une bonne qualité de vie (disparition des bouffées de chaleur, amélioration notable de la sécheresse vaginale, correction des troubles du métabolisme du sucre et du cholestérol, prévention de l’ostéoporose  en particulier) sans exposer au risque de cancer du sein puisque l’absence d’utérus permet de n’utiliser que les seuls estrogènes.

En conclusion, les cancers gynécologiques du syndrome de Lynch occupent une place quantitativement importante, et peuvent bénéficier d’un diagnostic précoce pour peu que les patientes en soient informées, d’un dépistage simple et acceptable, et d’une prévention aujourd’hui chirurgicale et peut-être médicale si les essais en cours sont concluants.

Dr Vincent Lavoué & Pr Jean Levêque – Rennes 2013

Syndrome de Lynch et tube digestif

Pr. Jean-François Bretagne
Service des maladies de l’appareil digestif – Hôpital Pontchaillou – CHU Rennes

                                                                 Cancer colorectal

Le risque de cancer colorectal (CCR) est très élevé chez les personnes porteuses d’une mutation d’un des gènes impliqués dans le syndrome de Lynch, plus encore avec certains gènes que d’autres. C’est la raison pour laquelle il est proposé de réaliser des coloscopies chez ces personnes, soit pour déceler et réséquer des polypes adénomateux – appelés adénomes – avant qu’ils ne se transforment en cancer, soit pour faire le diagnostic de cancer à un stade précoce où il est curable.

Les coloscopies doivent être faites à partir de l’âge de 20 ans, tous les 1 à 2 ans. On adopte en général le rythme d’une coloscopie tous les 2 ans, mais ce délai entre 2 examens peut être réduit à un an lorsque des adénomes sont découverts. Les coloscopies se font habituellement sous anesthésie générale et elles doivent être complètes, c’est-à-dire permettre l’examen de la totalité du côlon. La préparation doit être d’excellente qualité pour pouvoir visualiser et réséquer de petits polypes qui en cas de Lynch peuvent être déjà cancéreux. C’est dire la nécessité d’un régime sans résidus bien suivi pendant au minimum 3 jours avant la coloscopie et d’une purge dont les modalités rendent aujourd’hui la préparation parfaitement acceptable. Le gastroentérologue qui pratique la coloscopie doit utiliser un colorant, l’indigo-carmin, pour se donner toutes les chances de démasquer de petites lésions difficiles à voir spontanément. Les colorations électroniques disponibles sur certains types de coloscopes ne remplacent pas cette coloration. Toutes ces précautions, préparation bien faite et examen minutieux, devraient conduire à une diminution du nombre de cas de cancer d’intervalle diagnostiqués entre 2 coloscopies.

                                                                Cancer de l’estomac

Le risque cumulé de cancer de l’estomac chez les personnes porteuses d’une mutation est d’environ 5%. Pour cette raison, il est recommandé d’effectuer une fibroscopie lors de la première coloscopie, dans le but de rechercher une contamination de l’estomac par Helicobacter pylori qui est un facteur cancérigène reconnu pour l’estomac. Lorsqu’une infection est présente (20 % des personnes jeunes), on proposera d’éradiquer Helicobacter pylori à l’aide d’un traitement antibiotique et de vérifier ensuite que l’éradication a été obtenue. Les avis divergent quant à la nécessité de refaire des fibroscopies systématiques ensuite. Pourtant, l’anesthésie générale nécessaire à la réalisation de la coloscopie facilite la surveillance de l’estomac lors de chaque coloscopie. La fibroscopie permet aussi l’examen du duodénum, qui est potentiellement le siège de cancers au cours du syndrome de Lynch.

                                                        Cancers digestifs et aspirine

Il a été montré que chez des hommes fumeurs ayant des problèmes cardiaques nécessitant de prendre de l’aspirine, l’aspirine diminuait significativement le risque de CCR et de mortalité par CCR. Au cours du syndrome de Lynch, l’étude CAPP2 a montré que la prise régulière d’aspirine pendant au moins 2 ans entraînait une réduction du risque de CCR de 60 % versus un placebo. De plus, l’aspirine pourrait être bénéfique pour d’autres cancers que le CCR. Une nouvelle étude internationale CAPP3 vient de débuter en 2013 pour déterminer quelle est la meilleure dose d’aspirine. Cette étude compare 3 dosages d’aspirine différents, 600, 300 et 100 mg/j. La dose utilisée dans l’étude CAPP2 était de 600 mg/j, mais des doses moindres sont peut-être tout aussi efficaces. Faut-il que toutes les personnes atteintes d’un syndrome de Lynch prennent de l’aspirine ou ne faut-il réserver l’aspirine qu’aux personnes ayant déjà fait un CCR ou des adénomes du côlon ? Nul ne sait répondre à cette question. La réponse est difficile, car la prise d’aspirine expose au risque de complications hémorragiques, notamment d’hémorragies digestives, ce qui pose la question de la balance bénéfice-risque. Dans l’attente d’une réponse scientifique claire, la question mérite d’être débattue entre chaque personne concernée et son médecin.

Professeur Jean-François Bretagne – Hopital Pontchaillou – CHU Rennes 2013

Aspect génétique du syndrome de LYNCH

M. Brivaël GERY – Conseiller en Génétique – CHU Rennes

Le corps humain est constitué de milliards de cellules qui possèdent chacune un noyau dans lequel se trouve notre patrimoine génétique. Ce patrimoine génétique est notre plan de fabrication. Il est organisé en 46  chromosomes regroupés en 23 paires. Pour chacune de ces paires, un chromosome provient du père, un de la mère. Ces chromosomes sont constitués d’un filament (la molécule d’ADN) enroulé sur lui même. L’ADN est formé à partir de 4 lettres (A T C G) et correspond à un texte de 3 milliards de lettres. Chacun de nos caractères (couleurs des yeux, forme du visage etc…) est déterminé par des parties bien précises de cet ADN appelées des gènes. Notre patrimoine génétique est composé d’environ 25 000 gènes. Nos gènes étant sur nos chromosomes, nous avons également 2 copies par gène (1 paternelle et 1 maternelle). Les gènes sont des plans de fabrication qui permettent à la cellule de produire des protéines qui sont les molécules qui  remplissent les fonctions indispensables à son fonctionnement.

Les cellules de l’organisme se renouvellent en permanence. Lorsqu’une cellule se divise, elle doit recopier à l’identique l’ensemble de son patrimoine génétique, soit les 3 milliards de lettres qui composent l’ADN. Il se produit fréquemment des erreurs (mutations) lors de ces divisions. Nous possédons des systèmes chargés de repérer et de réparer ces erreurs. Si ces systèmes sont défaillants, la cellule accumule un grand nombre de mutations et à terme peut devenir cancéreuse. En général, ces systèmes fonctionnent normalement à la naissance mais, sous l’effet de l’environnement (alcool, tabac, pollution…), des anomalies apparaissent. Parfois, chez certaines personnes ces systèmes sont défaillants dès la naissance, ce qui facilite l’apparition de mutations et à terme de cancers. C’est le cas des personnes porteuses du syndrome de LYNCH.

Le syndrome de LYNCH, ou syndrome HNPCC (Hereditary Non Polyposis Colorectal Cancer), est la forme la plus fréquente de prédisposition aux cancers du colon. Il concerne 1 personne sur 500 à 800. Son mode de transmission est autosomique dominant : autosomique signifiant qu’il concerne aussi bien les hommes que les femmes, dominant qu’une personne porteuse du syndrome de LYNCH a un risque sur deux de transmettre cette maladie, une chance sur 2 de ne pas la transmettre et ce, à chaque grossesse.

Le Syndrome de LYNCH est lié à une mutation d’un des gènes hMLH1, hMSH2, hMSH6, hPMS2. Ces gènes composent le système MMR (MisMatch Repair) dont le rôle est de repérer les fautes (mutation) qui se produisent à chaque division cellulaire et de les corriger afin que l’ADN reste identique d’une cellule à l’autre. Lorsque ce système ne fonctionne plus correctement, les erreurs de copie s’accumulent au fur et à mesure des divisions cellulaires avec, à terme, le risque que la cellule devienne cancéreuse.

Les cancers liés à un syndrome de LYNCH présentent des caractéristiques particulières au niveau de certaines parties de l’ADN appelées microsatellites, qui correspondent à des répétitions successives d’un même groupe de lettres (ex: cacacacacacac…). Ces parties d’ADN sont plus difficiles à recopier pour la cellule et il apparaît souvent des erreurs dans le nombre de répétitions, avec une variation de ce nombre entre les différentes cellules (instabilité microsatellitaire). Lorsque le système MMR fonctionne, il permet de maintenir un nombre similaire d’une cellule à l’autre, dans le cas contraire ce nombre est variable.

Il est possible aujourd’hui par une analyse sur le cancer de regarder si ce dernier présente une instabilité de son ADN ou pas. En plus de cette analyse, on recherche également dans les cellules tumorales la présence ou l’absence des protéines MMR directement fabriquées par les gènes MMR. L’absence d’une protéine MMR, couplée à une instabilité microsatellitaire dans une tumeur, permet de faire le diagnostic du syndrome de LYNCH de façon fiable. Ces analyses sont donc à l’heure actuelle réalisées devant tout cancer évoquant un syndrome de LYNCH découvert avant l’âge de 60 ans.

Si l’analyse de la tumeur et/ou l’histoire familiale évoquent un syndrome de LYNCH, on propose ensuite des analyses directes des gènes hMLH1 ou hMSH2 ou hMSH6 ou hPMS2. L’analyse génétique est réalisée à partir d’une prise de sang et d’un prélèvement salivaire. On teste si possible une personne atteinte d’un cancer présentant ces caractéristiques particulières. Si l’analyse retrouve une anomalie sur un de ces gènes, on peut alors proposer un test aux apparentés majeurs qui le souhaitent, afin de savoir s’ils ont besoin d’un suivi particulier ou non. Les personnes porteuses de cette anomalie auront ensuite un risque de la transmettre à leurs enfants.

Brivaël GERY – Conseiller en Génétique CHU Rennes 2013

Une prise en charge multidisciplinaire

Un programme de prise en charge multidisciplinaire des personnes porteuses d’une prédisposition héréditaire fréquente au cancer a été déployé par l’Institut National du Cancer en France sous forme d’un programme pilote en 2009 et d’une extension nationale en 2012.

Dix-sept centres de prise en charge multidisciplinaire ont été financés en France, permettant d’organiser l’activité autour des objectifs suivant :
– mettre en œuvre un suivi individualisé des personnes concernées
– coordonner leur prise en charge au niveau régional, voire interrégional
– faciliter l’accès aux compétences multidisciplinaires en interne ou à l’extérieur
– assurer une activité de recours et d’expertise pour les cas difficiles.

L’exemple d’un centre pilote à Paris, le centre de suivi multidisciplinaires GPCOSAThttp://gpcosat.aphp.fr devenu PREDIF par extension en Ile de France.

Parmi les centres récemment créés, HERMION, en Provence-Alpes-Côte d’Azur, est une structure mixte assurant la prise en charge des personnes porteuses d’une prédisposition au cancer du sein et de l’ovaire, coordonnée par l’Institut Paoli-Calmettes, et celle des personnes porteuses d’une prédisposition aux cancers digestifs, PHRATries, coordonnée par l’hôpital La Timone (AP-HM) à Marseille.

Dépistage colique au cours du syndrome de Lynch : la coloscopie et sa préparation en 2011

Dr Julien BRANCHE Gastroentérologie – CHRU Lille

 La coloscopie est la méthode la plus efficace pour explorer la muqueuse du colon. Elle est indiquée pour investiguer les troubles du transit et le dépistage des polypes : la coloscopie permet aussi bien de réaliser une inspection visuelle que de prélever des échantillons (biopsies) et retirer des polypes. Ainsi, la coloscopie est aujourd’hui l’examen de référence pour le dépistage et le traitement des lésions précancéreuses du colon.
Pour le dépistage du cancer colorectal, la population française est divisée en trois groupes : Le groupe à risque moyen concerne la population générale, qui participe au dépistage organisé. Ce sont les personnes de 50 à 74 ans, asymptomatiques, sans antécédent personnel ni familial au 1er degré de polype ou de cancer colorectal, qui se voient proposer la recherche de sang occulte dans les selles tous les deux ans (HemoccultII®), et la réalisation de la coloscopie en cas de test positif. Le groupe à risque élevé concerne les personnes avec un antécédent personnel ou au 1er degré (fratrie, parents) de polype ou de cancer colorectal. La coloscopie de dépistage est indiquée à partir de l’âge de 45 ans ou 5 ans avant l’âge de diagnostic de polype ou cancer chez le parent.

Le groupe à risque très élevé concerne les personnes avec une prédisposition génétique familiale au cancer du colon. Les syndromes les plus fréquents sont la polypose adénomateuse familiale (PAF) nécessitant une coloscopie tous les 1-2 ans dès l’âge de 10 ans, et le syndrome de Lynch au cours duquel la coloscopie avec chromoendoscopie est indiquée tous les 2 ans dès l’âge de 20 ans.

Le « parcours » vers la coloscopie débute par la consultation avec le gastroentérologue. L’indication de l’examen sera vérifiée, les modalités de réalisation de la coloscopie et surtout de sa préparation seront expliquées. Lors de la consultation d’anesthésie seront précisés les antécédents, les traitements en cours et vérifiées les conditions de prise en charge en ambulatoire (sortie au domicile le jour de l’anesthésie générale).

Une coloscopie de dépistage de qualité doit être complète (explorer la totalité du colon) et la préparation doit être parfaite : la persistance de matières fécales adhérentes à la paroi intestinale gène l’exploration minutieuse. Une mauvaise préparation a de multiples conséquences : le risque de coloscopie incomplète est majoré, la coloscopie est techniquement plus difficile (donc plus à risque), elle est plus longue et le taux de détection des polypes est diminué, réduisant la qualité du dépistage et la protection vis-à-vis de la mortalité par cancer colorectal.

Plusieurs préparations coliques sont disponibles sur le marché Deux grandes catégories ont été utilisées au cours des dernières années.
Le Polyéthylèneglycol (PEG) complété avec des électrolytes : Fortrans®, Klean-Prep®, Colopeg®. Ces préparations ont l’avantage d’une quasi absence de contre indication. Elles consistent à boire 4 litres de préparation régulièrement sur 4 heures (1 verre de 250 ml toutes les 15 minutes) la veille de l’examen. En cas de coloscopie en fin de matinée ou l’après midi, la préparation peut être divisée en deux (3 litres la veille, 1 litre le matin).
C’est l’augmentation du volume des selles qui permet un effet « chasse d’eau » de la purge intestinale.
L’inconvénient de ces préparations est le volume de produit à ingérer, de multiples « astuces », bien résumées sur le site de l’association, permettent d’en améliorer la tolérance. Le Moviprep® est une préparation par PEG avec adjonction de vitamine C. Son avantage est de ne comprendre que 2 litres de produit, l’inconvénient est de ne pas être totalement pris en charge par l’Assurance Maladie.

Les Phosphates de sodium : Fleet Phospho-Soda®. Le produit actif est constitué de deux flacons de 45 ml à boire à 4 heures d’intervalle. Cependant là aussi la purge nécessite la prise d’au moins deux litres de liquide clair entre les deux prises. Ces préparations peuvent entraîner des troubles hydro électrolytiques et sont contre-indiquées notamment en cas d’insuffisance cardiaque ou rénale sévère.

Plusieurs études ont étudié ces deux classes de produits, la plupart retrouvaient une efficacité comparable. La compliance et la tolérance étaient plutôt améliorées avec le phosphate de sodium.

Depuis quelques mois sont disponibles trois nouvelles préparations : Deux préparations associent un laxatif à un stimulant du péristaltisme (contractions intestinales) (Picosulfate de sodium, Oxyde de magnésium léger, Acide citrique anhydre) : Picoprep® et Citrafleet®. Le principe actif est contenu dans deux sachets à diluer (parfum orange ou citron) dans un verre d’eau et à boire à 6-8 heures d’intervalle. Entre les deux prises il faut toujours boire au moins deux litres de liquide clair pour assurer une vidange intestinale : c’est là encore l’effet chasse d’eau associé aux principes actifs laxatifs et stimulants du péristaltisme indispensable à un effet purge.

Une préparation par comprimés : Colokit® (à base de Phosphate de sodium). Elle consiste à   prendre 4 comprimés toutes les 15 minutes, avec un minimum de 250 ml d’eau ou de liquide clair, pour un total de 32 comprimés, associés à la boisson d’au moins 2 litres de liquide clair. Comme dans toutes les préparations l’hydratation abondante est indispensable. La préparation peut être totalement prise la veille de l’examen pour une coloscopie le matin, ou séparée en deux avec une prise de 20 comprimés la veille et 12 comprimés le matin en cas de coloscopie l’après midi.

Une chromoendoscopie est indiquée pour toute personne porteuse du syndrome de lynch
Il s’agit de l’application d’un colorant de surface bleu (indigo carmin) qui, pulvérisé sur la muqueuse intestinale, permet de rehausser et donc mieux visualiser les polypes plans et en améliore de ce fait la détection. La chromoendoscopie ne nécessite pas d’endoscope spécifique
La première partie de la coloscopie consiste à avancer l’endoscope jusqu’à la partie terminale du colon (caecum). Un cathéter spray est inséré dans le canal opérateur de l’endoscope et le produit est pulvérisé lors du retrait de l’endoscope. Ensuite, l’endoscope est à nouveau poussé jusqu’au caecum. L’étude attentive de la paroi intestinale est réalisée lors du retrait progressif de l’endoscope. La coloscopie est à ce jour le seul examen pour dépister et traiter les lésions précancéreuses du colon.

Une motivation du gastroentérologue  et  du patient sont indispensables pour un dépistage de qualité. L’utilisation de la chromoendoscopie augmente la détection des polypes plans, donc la qualité de l’examen. Les nouvelles galéniques de préparation colique améliorent probablement la pénibilité de la préparation, qui doit être répétée tous les deux ans dans le syndrome de Lynch.

Dr Julien Branche – Oct 2011

1999-2009 : Dix ans d’activité sur le syndrome de Lynch

Dr Sylviane Olschwang Institut Paoli-Calmettes et Centre de Recherches en Cancérologie de Marseille (UMR891)

Connu à travers une première description médicale de Warthin dès 1913, puis individualisé en tant que syndrome en 1966 par Lynch, il a pu être relié a la présence de mutations responsables de la prédisposition au cancer en 1993. C’était le début d’une longue série, 4 gènes étant désormais associés au syndrome de Lynch, MSH2, MLH1, MSH6 et PMS2 ; tous sont des gènes dits MMR, qui contrôlent la qualité de l’ADN dans les cellules en division. Les mutations sont multiples, mais leurs conséquences sur le risque de cancer sont très semblables. Dès l’identification des deux gènes principaux, MSH2 en 1993 et MLH1 en 1994, quelques laboratoires d’oncogénétique moléculaire français ont proposé d’analyser ces gènes avec l’objectif d’intégrer cette analyse dans la prise en charge médicale des patients concernés. Ils étaient au nombre de 3 en 1995, 6 en 1998 et le réseau permettant de discuter et d’harmoniser les pratiques de ces laboratoires a été créé en 2000.

Deux ans plus tard, le ministère de la santé prenait la décision de financer les activités d’oncogénétique, plus tard relayé par l’Institut National du Cancer (INCa). Entre 2002 et 2009, une nouvelle facette de l’oncogénétique a chaque année été financée : 25 laboratoires en 2002, l’élaboration de recommandations nationales d’identification et de prise en charge du syndrome de Lynch et de la prédisposition au cancer du sein et de l’ovaire (BRCA) en 2003, 48 structures de consultation rayonnant sur 102 sites dans 66 villes en 2004. Les laboratoires ont vu leur activité renforcée en 2005, puis étendue grâce à la création de réseaux de prédispositions rares au développement de tumeurs en 2005 et la mise en place de bases nationales des mutations des gènes MMR et BRCA en 2006. Le développement de la formation des conseillers génétiques a permis leur intégration aux consultations en 2008. Un autre aspect de l’oncogénétique, en plein essor, a été financé en 2007 via l’implantation de 28 plateformes de génétique somatique regroupant 49 laboratoires, au sein desquels sont pratiquées les analyses génétiques des cellules cancéreuses, qui entrent dans l’évaluation diagnostique et thérapeutique des cancers. La promotion de leur intégration aux services hospitaliers de pathologie, qui deviennent progressivement des structures plus larges de bio-pathologie, a également été faite grâce à de nouveaux financements de l’INCa en 2008 et 2009, destinés à s’étendre en 2010.

En ce qui concerne spécifiquement le syndrome de Lynch, la mutation des gènes MMR a pour conséquence une dérive importante de la qualité de l’ADN dans les cellules cancéreuses, appelée phénotype MSI, qui est aisément reconnue par une analyse génétique de l’ADN, extrait de ces cellules à partir de prélèvements de tissus conservés dans les laboratoires d’anatomie pathologique en ayant fait l’analyse initiale, lors de leur prélèvement (biopsie, intervention chirurgicale …). Les recommandations nationales pour l’identification du syndrome de Lynch précisent qu’il est utile de réaliser cette analyse chez tous les patients atteints d’un cancer qui pourrait s’intégrer dans un syndrome de Lynch (côlon, rectum, endomètre …), dès lors qu’il survient avant l’âge de 60 ans (http://www.john-libbey-eurotext.fr/fr/revues/medecine/bdc/e-docs/00/04/08/08/resume.phtml ).

L’analyse synthétique du bilan de l’activité d’oncogénétique en France depuis le début de son financement fait apparaître que 70 à 80% concerne le syndrome de Lynch et la prédisposition au cancer du sein et de l’ovaire, et qu’il faudrait renforcer les efforts pour le syndrome de Lynch, aussi fréquent que la prédisposition au cancer du sein et de l’ovaire dans la population, alors qu’il n’aboutit à une prise en charge oncogénétique que dans une proportion deux fois moins importante. En particulier, ce travail de synthèse met l’accent sur la nécessité de promouvoir la systématisation des analyses génétiques somatiques à la recherche d’un phénotype MSI, telle qu’elle a été recommandée en 2003 (http://www.e-cancer.fr/v1/fichiers/public/bd_activite_oncogenetique_rapport_final.pdf ).

Le développement de l’activité d’oncogénétique autour du syndrome de Lynch a permis l’harmonisation progressive des pratiques d’identification et de prise en charge. Un effort important reste encore à fournir pour généraliser ces pratiques. Néanmoins, de nombreux progrès ont été faits dans la connaissance des risques de cancer liés à la présence d’une mutation d’un gène MMR grâce à deux études nationales initiées à partir de l’activité des laboratoires pour la première*, et de celle des consultations pour la seconde**, appelée ERISCAM, actuellement en cours. A l’issue du premier travail de synthèse sur le syndrome de Lynch en 2003, les recommandations de prise en charge des risques de cancer ont été affinées et sont accessibles dans leur intégralité sur le site de l’INCa (http://www.e-cancer.fr/Les-Soins/Oncogenetique/op_1-it_153-la_1-ve_1.html ). Les présentations de la matinée en présentent une synthèse en tous points d’actualité.

Enfin, des recherches sont menées dans les domaines de la prévention et de la quantification précise des risques des personnes porteuses d’une mutation dans un gène MMR. Il s’agit pour les deux aspects d’études internationales à très large échelle, l’étude CAP ait l’objet d’une communication spécifique, et l’étude MOMA. Cette dernière est coordonnée par Malcolm Dunlop en Grande-Bretagne et cherche à identifier des variations de risque entre les personnes porteuses de mutations identiques.
L’hypothèse est leur constitution génétique propre, naturellement variable en dehors de cette mutation, serait à même d’influer sur le risque de cancer, en l’augmentant ou en le diminuant.

Il est maintenant connu, par exemple, que le cancer du colon ou du rectum, lorsqu’il survient, se développe chez les femmes en moyenne dix ans plus tard que chez les hommes, et la question se pose de différer le début du dépistage par coloscopie. Mais il est indispensable pour prendre une telle décision d’avoir des arguments irréfutables d’efficacité.
Aussi, cette question nécessite une étude plus large et complète, qui s’étend au-delà de la simple observation du sexe. C’est le but de l’étude MOMA, qui cherche à identifier ce qu’on appelle des gènes modificateurs des mutations des gènes MMR.
En conclusion, ces dix dernières années ont été d’une grande richesse pour notre compréhension des prédispositions génétiques aux cancers fréquents. Tous nos efforts, tant dans une démarche médicale que pour le développement des recherches, ont été soutenus par l’INCa, et les prochaines années, à travers les projets décrits brièvement ici, laissent présager une poursuite productive de l’ensemble de ces activités.

* Parc Y, Boisson C, Thomas G, Olschwang S. Cancer risk in 348 french MSH2 or MLH1 gene carriers. J Med Genet 2003;40:208-213 – Olschwang S, Lasset C, Baert-Desurmont S, Buisine MP, Wang Q, Hutter P, Rouleau E, Caron O, Bourdon V, Thomas G. Age dependent cancer risk is not different in between MSH2 and MLH1 mutation carriers. J Cancer Epidemiol. 2009
** Carayol J, Bonaïti-Pellié C. Estimating penetrance from family data using a retrospective likelihood when ascertainment depends on genotype and age of onset. Genet Epidemiol 2004;27:109-17.

>> Les Faits marquants depuis 10 ans

Dr Sylviane Olschwang – Octobre 2009

MAP, une nouvelle classe dans les maladies héréditaires qui prédisposent au cancer colorectal

Dr Sylviane OLSCHWANG, Institut Paoli-Calmettes, INSERM 599, Marseille, Pour le conseil scientifique de l’association HNPCC-France – olschwangs@marseille.fnclcc.fr
La polypose adénomateuse familiale, FAP est une maladie connue depuis longtemps, qui se caractérise par le développement de plusieurs centaines, voire plusieurs milliers de polypes adénomateux sur le colon et le rectum. Les premiers polypes apparaissent généralement autour de la puberté, plutôt dans le colon gauche et sigmoïde. La polypose s’étend ensuite, si bien qu’il est habituellement proposé une intervention chirurgicale à laquelle ne peut se substituer une surveillance endoscopique au long cours, la colectomie seule permettant de supprimer le risque de dégénérescence lorsque la polypose est diffuse. La transmission de cette maladie est autosomique dominante, due à la présence d’une mutation constitutionnelle dans le gène appelé APC (identifié en 1991), qui peut se situer n’importe où sur le gène. L’expression principale d’une telle mutation, à savoir le développement des polypes adénomateux colorectaux, est complète à 40 ans. Cette mutation prédispose, en outre, au développement de polypes dans l’estomac : la polypose fundique glandulokystique, sans risque de dégénérescence, et dans le duodenum, dont la surveillance endoscopique est importante. D’autres manifestations peuvent être décelées, caractéristiques du gène APC, qui sont l’hyperpigmentation de la rétine, CHRPE, et des énostoses, condensations sur les os de la tête sans conséquence pathologique. Plus rarement, il existe un risque de tumeur desmoïde ou d’autres tissus, sans que ces risques néanmoins justifient un dépistage spécifique.
En dehors de cette forme « classique » de polypose adénomateuse rare, il existe une polypose « atténuée » appelée AAPC lorsque elle se limite à la polypose digestive, et plus généralement AFAP, lorsqu’il existe également des manifestations extra-digestives. Cette forme atténuée se caractérise par le développement de polypes adénomateux dénombrables par endoscopie, à un âge plus tardif et plutôt dans le colon droit, qui nécessite rarement le recours à une intervention chirurgicale radicale. Cette forme « atténuée » est due parfois à des mutations du gène APC, situées à des endroits bien particuliers du gène, appelés exons 3, 4 et 9. C’est la forme AAPC, identifiée en 1993. La forme AFAP non exclusivement digestive est due à des mutations à l’autre extrémité du gène APC et a été découverte plus récemment. La présence de manifestations extra-digestives chez une personne ayant une polypose signifie que le gène APC en est à l’origine.
La présence d’une polypose adénomateuse digestive isolée, AAPC, chez une personne adulte signifie que le gène APC peut être responsable, mais pas toujours.
La forme AAPC peut être également (beaucoup plus fréquemment) causée par des mutations d’autres gènes, en particulier MYH, découvert en 2002.
Cette polypose, appelée MAP, est donc une nouvelle catégorie des polyposes adénomateuses « atténuées ». Il apparaît, dans cette polypose MAP, que le risque d’évolution des adénomes colorectaux, même peu nombreux, soit comparable au syndrome HNPCC, et c’est la raison pour laquelle, actuellement, les recommandations de dépistage par coloscopie sont identiques. Le risque de développement de polypes adénomateux dans le duodenum rejoint par contre celui de la polypose adénomateuse « classique », et il est donc proposé d’adjoindre au dépistage par coloscopie, un examen endoscopique de la partie haute du tube digestif, au même rythme. En revanche, il ne semble pas exister de manifestation extra-digestive.
La polypose AAPC, en particulier la polypose MAP, est donc une maladie hybride entre la polypose adénomateuse « classique » et le syndrome HNPCC, mais bien distincte, que les caractéristiques cliniques et biologiques permettent de reconnaître et qui peut aujourd’hui bénéficier d’une prise en charge spécifique.

Sylviane Olschwang – mars 2006

Organisation nationale des laboratoires de génétique

Pr Thierry Frébourg service de Génétique CHU de Rouen
Matinée d’Information sur le syndrome HNPCC, Rouen, Samedi 18 Octobre 2003

Lorsque la mutation a été identifiée chez le cas index , les membres de la famille pourront bénéficier, à partir de l’âge de 18 ans, de la recherche de cette mutation au décours d’une consultation de génétique. Les sujets non porteurs de la mutation n’auront pas besoin d’avoir une surveillance médicale particulière alors que les sujets porteurs auront tous les 2 ans un dépistage des tumeurs du colon et du rectum et chez les femmes des tumeurs de l’utérus.
Le diagnostic génétique du syndrome HNPCC étant compliqué (chaque famille atteinte présentant le plus souvent une mutation particulière, c’est à dire une faute d’orthographe sur son patrimoine génétique qui lui est spécifique) la prise en charge du syndrome HNPCC a imposé une organisation et une coordination nationale des laboratoires effectuant ces analyses en France : Tous les laboratoires français réalisant le diagnostic du syndrome HNPCC se réunissent régulièrement, mettent en commun leurs résultats et collaborent pour mettre au point de nouvelles analyses permettant de détecter des mutations qui échappaient jusqu’à présent aux méthodes d’analyse utilisées.
Début 2003, les laboratoires réalisant le diagnostic du syndrome ont reçu du Ministère de la Santé, après évaluation de leur activité, des financements importants.
Il s’agit des laboratoires de génétique du CHU de Rouen, de Saint Antoine à Paris, du Centre Léon Bérard à Lyon, du CHU de Lille, de l’Institut Bergonié à Bordeaux, du CHU de Montpellier, Strasbourg, de l’Institut Paoli Calmette à Marseille, de Hôpital Cochin à Paris, et du CHU de Nancy.
Ces financements permettent aux laboratoires de recruter du personnel, d’augmenter leur activité, et donc
d’analyser plus de familles et de réduire les délais des analyses. La prochaine étape de l’amélioration de la prise en charge du syndrome HNPCC, prévue dès début 2004, sera le renforcement des consultations de génétique par le Ministère de la santé, ce qui permettra, en particulier, de pouvoir proposer aux familles une aide psychologique.
Février 2004 : quatorze laboratoires sont à ce jour spécialisés dans les analyses du syndrome HNPCC/Lynch

Le Pr. Thierry Frébourg, CHU de Rouen nous précise que  » l’activité en réseau des laboratoires HNPCC fonctionne très bien et a permis la mise en place rapide d’un premier contrôle de qualité des laboratoires.
D’autre part, le problème de la détection des remaniements des gènes MSH2 et MLH1 étant réglé,
notre objectif en 2004 est de développer de nouvelles technologies permettant de détecter les mutations touchant les régions des gènes MSH2 et MLH1 non explorées, le but étant d’augmenter le pourcentage des familles avec mutation identifiée qui peuvent bénéficier d’une prise en charge codifiée. « 
Les Laboratoires peuvent se trouver sur le site www.orpha.net en cherchant la maladie rare < hnpcc>
Les Consultations peuvent se trouver sur le site www.fnclcc.fr <mÉdecins spécialistes= » »>< consultants en oncogénétique>

Instabilité Génétique

Professeur Pierre Laurent-Puig, Service de Chirurgie Digestive et Oncologique, Hôpital Européen Georges Pompidou, Paris et Faculté de Médecine Paris 5, Université Renée Descartes

Les molécules d’ADN qui sont présentes dans le noyau des cellules portent l’information génétique permettant à nos cellules d’effectuer les différentes tâches nécessaires à notre organisme. Ces cellules sont en perpétuel renouvellement et pour assurer la transmission de l’information génétique aux deux cellules filles, la cellule mère avant de se diviser doit répliquer son matériel génétique à l’identique. Des ADN polymérases sont impliquées dans cette tâche, ces enzymes ont une fidélité de recopie imparfaite et des erreurs sont commises tout au long de la molécule d’ADN.
Il existe cependant une variation dans ce taux d’erreur qui dépend de la structure de la molécule d’ADN et de l’enchaînement des 4 bases élémentaires qui composent la chaîne d’ADN. En particulier les séquences répétées, composée d’un, de deux ou de trois nucléotides répétés n fois sont le siège d’erreurs plus fréquentes lors de la duplication de la molécule d’ADN (séquences microsatellite), le nombre de ces répétitions varie alors d’une ou plusieurs répétitions. Ces erreurs sont corrigées par différents systèmes enzymatiques de réparation qui permettent à la cellule mère de transmettre le matériel génétique le plus intact possible aux deux cellules filles afin d’éviter la survenue de mutations qui pourraient entraîner un dysfonctionnement de la cellule.
Un certain nombre de maladies humaines trouvent leur origine dans un dysfonctionnement de ces systèmes de réparation. C’est le cas dans le syndrome HNPCC. En effet, les protéines MSH2 MLH1 et MSH6 altérées dans le syndrome HNPCC participent au système de réparation des mésappariement de l’ADN. Ces altérations modifient la capacité de nos cellules à réparer les lésions induites et entraînent une instabilité génétique caractéristique du syndrome HNPCC se traduisant par une instabilité des loci microsatellitaires.
Cette anomalie est à la base du test MSI* proposé pour l’analyse des caractéristiques moléculaires des cellules tumorales prélevées sur un fragment d’une tumeur colorectale. Chez un sujet jeune atteint d’un cancer colorectal, la présence d’une telle instabilité au niveau de ces cellules tumorales est un argument qui doit faire suspecter l’existence d’une prédisposition familiale de type HNPCC indépendamment de l’histoire familiale ou personnelle du malade. Ce test est de réalisation simple et il est de plus en plus diffusé au sein des laboratoires de biologie moléculaire. Il permet lorsqu’il est positif (présence d’une instabilité) de renforcer l’impression clinique de prédisposition génétique de type HNPCC et d’orienter les malades vers une consultation d’oncogénétique.
* MicroSatillite Instability

Pierre Laurent-Puig – Novembre 200

La consultation d’oncogénétique

Dr Capucine Delnatte Consultation Oncogénétique Centre René Gauducheau – Nantes

Un des principaux objectifs de la consultation d’oncogénétique (génétique appliquée à la cancérologie) est d’identifier les familles dans lesquelles il existe une prédisposition héréditaire majeure aux cancers. On considère qu’ environ 5 à 10% des familles sont concernées par ce type de prédisposition. Certains éléments sont évocateurs de son existence tels qu’un diagnostic de cancer à un âge précoce (par rapport à l’âge moyen d’apparition de la maladie), la multiplicité des lésions tumorales, la présence dans une même branche parentale d’un type de cancer récurrent ou d’autres cancers liés à la prédisposition suspectée.
Ces situations sont généralement identifiées par les oncologues ou les spécialistes d’organes qui proposent au patient une consultation d’oncogénétique. Ce dernier a le choix de ne pas accepter la consultation, il est en effet important que ce soit une démarche volontaire et personnelle.
Après avoir repris les différents éléments de l’histoire personnelle et familiale du patient (constitution d’un arbre généalogique), l’oncogénéticien pourra suspecter une prédisposition héréditaire au cancer. Il proposera alors une analyse génétique lorsque le(s) gène(s) impliqué(s) dans la prédisposition suspectée est (sont) connu(s). Cette étude se fait le plus souvent à partir d’un ou plusieurs prélèvements sanguins sur une des personnes ayant déjà eu un cancer. Cette première personne étudiée sera appelée « cas index ».
Lorsqu’une mutation est détectée, celle-ci pourra être recherchée chez les apparentés qui n’ont jamais développé de cancer (test pré-symptomatique). En fonction du résultat, l’oncogénéticien rassurera la personne qui n’a pas hérité de la mutation. Dans le cas contraire, l’oncogénéticien orientera le patient vers des conseils de prise en charge adaptée. Cette prise en charge consistera, le plus souvent, en une surveillance précoce et rapprochée conduite par des médecins spécialistes (gastro-entérologue, gynécologue)* Lorsqu’ aucune mutation n’est identifiée chez le cas index, cela n’élimine pas la possibilité de l’existence d’un facteur génétique. En effet, d’autres gènes de prédisposition, non encore identifiés, peuvent exister. Dans cette situation, il n’est pas possible de proposer une analyse chez les apparentés. Une surveillance leur sera alors proposée. **
Ces démarches de génétique pouvant avoir des répercussions psychologiques, des consultations auprès de psychologues sont très largement proposées. Les consultations d’oncogénétique concernant les prédispositions aux cancers du sein mais celles concernant les cancers colorectaux sont actuellement les plus nombreuses. Mais l’activité de consultation s’étend également à d’autres prédispositions aux cancers (tumeurs endocrines, cancer du rein, mélanome notamment). De plus, les indications des consultations d’oncogénétique évoluent avec les avancées scientifiques, de nouveaux gènes de prédisposition étant régulièrement identifiés.
* coloscopie avec chromoendoscopie tous les 2 ans à partir de 20 ans, et examen gynécologique à partir de 30 ans ** la même surveillance mais pour tous les membres apparentés de la famille (frères, sœurs, enfants) tant que la mutation n’a pas été identifiée.

Dr Capucine Delnatte – octobre 2006